Les programmes scolaires, un enjeu territorial

Il faut toujours se méfier des négations en politique. Lorsque Jean-Michel Blanquer disait en 2017 “il faut en finir avec le stop and go en matière éducative”, ne cherchait-il pas à se prémunir de ses propres arrières-pensées ? Pour cette dernière année avant la campagne présidentielle, le ministre, via une note du Conseil supérieur des programmes, met la main au dernier acte de déconstruction systématique des actions de ses prédécesseurs. En remettant en cause profondément les programmes de maternelle, il s’attaque à l’un des rares consensus assez évident pour la communauté éducative. En 5 ans, je n’ai jamais rencontré un.e enseignant.e de maternelle regrettant les anciens programmes.

Il ne s’agit pas ici de développer les sous-jacents idéologiques qui consistent à primariser la maternelle, à apprendre à lire, écrire, compter le plus tôt possible quand la France est déjà l’un des rares pays à adopter la forme scolaire pour les plus petits. Les pédagogues expliqueront mieux que moi cette maladie française de la pression académique dès le plus jeune âge.

La maternelle, première école du partenariat Etat / collectivité

En revanche, la maternelle résulte, plus qu’aucune autre école, d’un projet partagé entre l’Éducation nationale et les collectivités et où l’adhésion des parents est encore plus nécessaire. J’ai souvent regretté qu’on n’associe pas davantage les collectivités aux réflexions sur les évolutions pédagogiques. La réforme du collège par exemple, aurait été l’occasion de repenser l’espace scolaire pour le rendre plus modulable et favoriser les travaux de groupes et la place du numérique dans les apprentissages. Le dédoublement des CP/CE1 a montré à quel point la gestion des espaces dans l’école est déterminant pour la pédagogie. J’y reviendrai dans un prochain article.

En maternelle, la moitié du personnel de la classe est municipal, sans compter le périscolaire. Les villes ont développé de plus en plus de formations communes ATSEM/Enseignant.es pour que chacun.e contribue à l’acte éducatif. L’aménagement des espaces a été repensé progressivement en fonction des nouveaux programmes de 2015, afin de laisser davantage de place pour se mouvoir dans l’espace. Des moyens pédagogiques ont été acquis pour faire de la maternelle l’école du langage, de l’exploration du monde, de l’expression artistique, etc. A quoi sert tout ce travail partenarial s’il est remis en cause tous les 5 ans, alors que ce temps est à peine suffisant pour le mettre en place ?

Les collectivités devraient s’imposer davantage dans ce débat. Si l’Etat est incapable d’assurer la continuité des politiques publiques en matière éducative (chaque gouvernement a sa part de responsabilité), n’est-ce pas aux collectivités de jouer ce rôle ? N’est-ce pas à elles de rappeler qu’elles ne sont plus des prestataires de l’Etat mais bien des partenaires ? Qu’à ce titre elles sont garantes du bon usage des derniers publics, de la montée en compétence et de la reconnaissance de leurs agents, et qu’elles jouent un rôle essentiel aux côtés de l’Etat dans la réussite éducative de tous les enfants. Si toutefois ce dernier objectif est celui réellement souhaité…

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